Oyez oyez, braves lecteurs ! Je vous informe que j’ai récemment pris mon sextant le plus précis, celui équipé du meilleur vernier, pour calculer les différences de la déclinaison solaire et les variations dans l’azimut du lever et du coucher du soleil, si difficiles à mesurer à cause des changements dans la réfraction atmosphérique… et je peux vous certifier que le solstice d’hiver a bien eu lieu le 22 décembre dernier, à 4h27 ! Nous sommes donc bien…EN HIVER !
Vous ne croyez guère en la science et vous souhaitez des preuves plus évidentes, moins scientifiques ?
Soit ! Certains d’entre vous ont sans doute déjà rencontré en chemin Jack Frost, incarnation même de cette saison. Petit elfe rapide, espiègle et enfantin dont on ne connaît pas l'âge, il est aisément reconnaissable. Il a les cheveux blancs, une peau très pâle, voire bleutée, et du givre recouvre ses vêtements. C'est celui qui mord le nez et les orteils quand il fait froid et qui dessine sur les vitres des fleurs de glace. Il possède le pouvoir du gel. Aucune confusion possible !
Vous n’êtes pas encore convaincus ? Eh bien ! Osez soulever les feuilles dites mortes, écartez délicatement, sans déranger les grèbes et les aigrettes, les roseaux des rives de Meuse, Ornain ou autre rivière, grattez légèrement le trou où déjà hiberne le hibou….et cherchez d’où vient le frémissement des branches qui se balancent, même sans vent. Chuuttt ! Les elfes des ifs, ceux des bardanes et les fées des capselles, plus rares, sont de retour ! Si ça ce n’est pas LA preuve que, je le réécris, nous sommes bien en HIVER !
Ce solstice d'hiver est longtemps resté associé à un jour férié dans plusieurs cultures, mais de nos jours, « chez nous », les célébrations de l'Avent, de Noël (Nativité), du Jour de l'an ou encore de l'Épiphanie éclipsent quelques survivances. Puisque la saison hivernale est souvent caractérisée par une symbolique centrée sur le froid, l'obscurité et le désespoir, la dormance, la solitude… avant de poursuivre la lecture de cette rubrique, je vous invite à cliquer sur ce premier lien. Je vous imagine sourire…
Six mois après, l’hiver était venu ; l’hiver avec le terrible silence de ses gelées, la neige compacte et criarde, le givre rosé sur les branches des arbres, les dômes de fumée épaisse au-dessus des cheminées se détachant sur un ciel d’un bleu pâle et sans nuages, les tourbillons d’air chaud s’élançant des portes ouvertes, les figures fraîches et comme mordillées des passants, et le trot pressé des chevaux saisis par le froid. Une journée du mois de janvier touchait à sa fin ; le froid du soir condensait davantage encore l’air immobile, et le crépuscule couleur de sang s’éteignait avec rapidité.
(Yvan Tourgueniev, Pères et fils)
Les murailles du château étaient faites de neige amassée par les vents, qui y avaient ensuite percé des portes et des fenêtres. Il y avait plus d’une centaine de salles immenses. La plus grande avait une longueur de plusieurs milles. Elles étaient éclairées par les feux de l’aurore boréale. Tout y brillait et scintillait. Mais quel vide et quel froid ! Jamais il ne se donnait de fêtes dans cette royale demeure. C’eût été chose facile que d’y convoquer pour un petit bal les ours blancs, qui, la tempête servant d’orchestre, auraient dansé des quadrilles dont la gravité décente eût été en harmonie avec la solennité du lieu. Jamais on ne laissait non plus entrer les renards blancs du voisinage ; jamais on ne permettait à leurs demoiselles de s’y réunir pour babiller et médire, comme cela se fait pourtant à la cour de bien des souverains. Non, tout était vaste et vide dans ce palais de la Reine des Neiges, et la lumière des aurores boréales qui augmentait, qui diminuait, qui augmentait de nouveau, toujours dans les mêmes proportions, était froide elle-même. Dans la plus immense des salles, on voyait un lac entièrement gelé, dont la glace était fendue en des milliers et des milliers de morceaux ; ces morceaux étaient tous absolument semblables l’un à l’autre. Quand la Reine des Neiges habitait le palais, elle trônait au milieu de cette nappe de glace, qu’elle appelait le seul vrai miroir de l’intelligence.
(H.C. Andersen, La Reine des neiges- 7ème histoire)
Les hivers surtout les nettoyaient. S’ils mangeaient du pain au beau temps, les fringales arrivaient avec la pluie et le froid, les danses devant le buffet, les dîners par cœur, dans la petite Sibérie de leur cambuse. Ce gredin de décembre entrait chez eux par-dessous la porte, et il apportait tous les maux, le chômage des ateliers, les fainéantises engourdies des gelées, la misère noire des temps humides. Le premier hiver, ils firent encore du feu quelquefois, se pelotonnant autour du poêle, aimant mieux avoir chaud que de manger ; le second hiver, le poêle ne se dérouilla seulement pas, il glaçait la pièce de sa mine lugubre de borne de fonte. Et ce qui leur cassait les jambes, ce qui les exterminait, c’était par-dessus tout de payer leur terme. Oh ! le terme de janvier, quand il n’y avait pas un radis à la maison et que le père Boche présentait la quittance ! Ça soufflait davantage de froid, une tempête du Nord. M. Marescot arrivait, le samedi suivant, couvert d’un bon paletot, ses grandes pattes fourrées dans des gants de laine ; et il avait toujours le mot d’expulsion à la bouche, pendant que la neige tombait dehors, comme si elle leur préparait un lit sur le trottoir, avec des draps blancs. Pour payer le terme, ils auraient vendu de leur chair. C’était le terme qui vidait le buffet et le poêle. Dans la maison entière, d’ailleurs, une lamentation montait. On pleurait à tous les étages, une musique de malheur ronflant le long de l’escalier et des corridors. Si chacun avait eu un mort chez lui, ça n’aurait pas produit un air d’orgues aussi abominable. Un vrai jour du jugement dernier, la fin des fins, la vie impossible, l’écrasement du pauvre monde. La femme du troisième allait faire huit jours au coin de la rue Belhomme. Un ouvrier, le maçon du cinquième, avait volé chez son patron.
(Emile Zola - L'assommoir - Extrait du chapitre 10)
Il y avait dans ce temps-là de grands hivers, de brûlants étés. J’ai connu, depuis, des étés dont la couleur, si je ferme les yeux, est celle de la terre ocreuse, fendillée entre les tiges du blé et sous la géante ombelle du panais sauvage, celle de la mer grise ou bleue. Mais aucun été, sauf ceux de mon enfance, ne commémore le géranium écarlate et la hampe enflammée des digitales. Aucun hiver n’est plus d’un blanc pur à la base d’un ciel bourré de nues ardoisées, qui présageaient une tempête de flocons plus épais, puis un dégel illuminé de mille gouttes d’eau et de bourgeons lancéolés… Ce ciel pesait sur le toit chargé de neige des greniers à fourrages, le noyer nu, la girouette, et pliait les oreilles des chattes… La calme et verticale chute de neige devenait oblique, un faible ronflement de mer lointaine se levait sur ma tête encapuchonnée, tandis que j’arpentais le jardin, happant la neige volante… Avertie par ses antennes, ma mère s’avançait sur la terrasse, goûtait le temps, me jetait un cri :
– La bourrasque d’Ouest ! Cours ! Ferme les lucarnes du grenier !… La porte de la remise aux voitures !… Et la fenêtre de la chambre du fond !
Mousse exalté du navire natal, je m’élançais, claquant des sabots, enthousiasmée si du fond de la mêlée blanche et bleu noir, sifflante, un vif éclair, un bref roulement de foudre, enfants d’Ouest et de Février, comblaient tous deux un des abîmes du ciel… Je tâchais de trembler, de croire à la fin du monde.
Mais dans le pire du fracas ma mère, l’œil sur une grosse loupe cerclée de cuivre, s’émerveillait, comptant les cristaux ramifiés d’une poignée de neige qu’elle venait de cueillir aux mains mêmes de l’Ouest rué sur notre jardin…
(Colette, Sido)
Kvitøya, 5 août 1930 Un mois plus tôt, il s’est passé quelque chose sur l’une des terres les plus proches du pôle Nord, l’une des îles les plus reculées de l’archipel du Svalbard. Tout est parti d’un éclat de lumière qui cogne le métal quand le soleil s’y prend, d’une brillance inhabituelle avec laquelle les bêtes ont appris à vivre, où elles ont fait leur nid, leurs habitudes. Là-bas, tout semble uni, monochrome, pourtant tout est plus vif et étonnant qu’ailleurs. Au bord de l’eau, sur la dernière île, les rocs sont noirs, humides. Plus loin gagne le gris grêlé par la clarté. Des aréoles rosées marquent les pierres. Les mousses font la terre élastique. Les fleurs sont un duvet qu’une mouette aurait perdu en vol. Un accroc, un gouffre, une anomalie : c’est ce que vendent les premières agences de voyages qui viennent d’ajouter l’Arctique à leurs catalogues. Un voyage vers l’oubli. Ici, vous serez loin des préoccupations quotidiennes. Le blanc est un bandeau qu’on vous pose sur les yeux. Un large paysage qui ressemble à l’attente, au sommeil, une terre vierge qui saura prendre la forme de ceux qui la fouleront les premiers, nommeront ses embouchures, ses golfes, ses montagnes. Une glaise à pétrir, dont extraire les richesses puisqu’en dessous du blanc, il y a du noir, en dessous de la neige, du charbon. Quel paysage laisserait voir l’Arctique si on le dépouillait de la neige ? En août 1930, personne, encore, ne le sait. Pourtant, la montagne a déjà été percée, harnachée de colonnes de bois, des câbles pendent contre la roche, le noir affleure sous l’herbe rare, mais il suffit de s’éloigner des mines, de leur vie souterraine, pour trouver un territoire vaste, vierge, survivant à ceux qui l’ont arpenté, un lieu dont on pouvait mourir et dont la seule existence suffisait à prolonger le monde, par l’ignorance qu’on en avait. Pour s’y rendre, il faut laisser défiler les routes rabotées comme pierre ponce, frottées au blanc, au noir, il faut traverser la mer, suivre les chemins qui peu à peu se défont de tout ce que l’on connaît, maisons, passants, bêtes familières et jusqu’aux arbres, aux plantes, à la plus petite herbe, peu à peu dilués dans l’espace. Il faut arracher, renoncer, dépouiller.
(Un monde sans rivage, Hélène Gaudy)
Hiver, vous n'êtes qu'un vilain
Hiver, vous n'êtes qu'un vilain, Été est plaisant et gentil, En témoin de Mai et d'Avril Qui l'accompagnent soir et matin. Été revêt champs, bois et fleurs De sa livrée de verdure, Et de maintes autres couleurs, Par l'ordonnance de Nature. Mais vous, hiver, vous êtes plein De neige, vent, pluie et grésil : On doit vous bannir en exil. Sans vous flatter je parle plein, Hiver, vous n'êtes qu'un vilain !
(Charles d'Orléans)
Nuit de neige
Oh ! La terrible nuit pour les petits oiseaux ! Un vent glacé frissonne et court par les allées ; Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux, Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées. Dans les grands arbres nus que couvre le verglas Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège ; De leur œil inquiet ils regardent la neige, Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.
(Guy de Maupassant)
Un air d’octobre
Un air comme une traîne immense Un air qui ne finit jamais Un air d’octobre une romance Plus douce que le mois de mai
Un air qui toujours recommence Tes yeux ont le mal d’horizon Fou qui trouve assez bleu l’azur A qui le ciel n’est pas prison
Il faut aimer à démesure Ce n’est pas assez que raison Bel automne aux mains de velours C’est la chanson jamais chantée
C’est la chanson de notre amour C’est la chanson des roses-thé Dont le cœur est couleur du jour Est-il assez profond sanglot
Pour dire les déserts physiques Pareils aux ronds qu’on fait dans l’eau Les mots valent-ils la musique Du long désir au cœur enclos
Un air Elsa de la démence Un air qui ne finit jamais Un air d’octobre une romance Plus doux que n’est le mois de mai Un air comme une traîne immense
(Louis Aragon)
Rêvé pour l’hiver
L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose Avec des coussins bleus Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l'œil, pour ne point voir, par la glace, Grimacer les ombres des soirs, Ces monstruosités hargneuses, populace De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée... Un petit baiser, comme une folle araignée, Te courra par le cou...
Et tu me diras : « Cherche ! » en inclinant la tête, - Et nous prendrons du temps à trouver cette bête - Qui voyage beaucoup...
(Arthur Rimbaud)
Première gelée (extrait)
Voici venir l’Hiver, tueur des pauvres gens.
Ainsi qu’un dur baron précédé de sergents, Il fait, pour l’annoncer, courir le long des rues La gelée aux doigts blancs et les bises bourrues. On entend haleter le souffle des gamins Qui se sauvent, collant leurs lèvres à leurs mains, Et tapent fortement du pied la terre sèche. Le chien, sans rien flairer, file ainsi qu’une flèche. Les messieurs en chapeau, raides et boutonnés, Font le dos rond, et dans leur col plongent leur nez. Les femmes, comme des coureurs dans la carrière, Ont la gorge en avant, les coudes en arrière, Les reins cambrés. Leur pas, d’un mouvement coquin, Fait onduler sur leur croupe leur troussequin.
Oh ! Comme c’est joli, la première gelée ! La vitre, par le froid du dehors flagellée, Étincelle, au dedans, de cristaux délicats, Et papillote sous la nacre des micas Dont le dessin fleurit en volutes d’acanthe. Les arbres sont vêtus d’une faille craquante. Le ciel a la pâleur fine des vieux argents.
Voici venir l’Hiver, tueur des pauvres gens.
(Jean Richepin)
L’expiation (extrait)
Il neigeait. On était vaincu par sa conquête.
Pour la première fois l’aigle baissait la tête.
Sombres jours ! l’empereur revenait lentement,
Laissant derrière lui brûler Moscou fumant.
Il neigeait. L’âpre hiver fondait en avalanche.
Après la plaine blanche une autre plaine blanche.
On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau.
Hier la grande armée, et maintenant troupeau.
On ne distinguait plus les ailes ni le centre :
Il neigeait. Les blessés s’abritaient dans le ventre
Des chevaux morts ; au seuil des bivouacs désolés
On voyait des clairons à leur poste gelés,
Restés debout, en selle et muets, blancs de givre,
Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre.
Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs,
Pleuvaient ; les grenadiers, surpris d’être tremblants,
Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise.
Il neigeait, il neigeait toujours ! la froide bise
Sifflait ; sur le verglas, dans des lieux inconnus,
On n’avait pas de pain et l’on allait pieds nus.
Ce n’étaient plus des cœurs vivants, des gens de guerre ;
C’était un rêve errant dans la brume, un mystère,
Une procession d’ombres sur le ciel noir.
La solitude, vaste, épouvantable à voir,
Partout apparaissait, muette vengeresse.
Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse
Pour cette immense armée un immense linceul ;
(Victor Hugo)
En hiver
Le sol trempé se gerce aux froidures premières, La neige blanche essaime au loin ses duvets blancs, Et met, au bord des toits et des chaumes branlants, Des coussinets de laine irisés de lumières.
Passent dans les champs nus les plaintes coutumières, A travers le désert des silences dolents, Où de grands corbeaux lourds abattent leurs vols lents Et s'en viennent de faim rôder près des chaumières.
Mais depuis que le ciel de gris s'était couvert, Dans la ferme riait une gaieté d'hiver, On s'assemblait en rond autour du foyer rouge,
Et l'amour s'éveillait, le soir, de gars à gouge, Au bouillonnement gras et siffleur, du brassin Qui grouillait, comme un ventre, en son chaudron d'airain.
(Emile Verhaeren)
Les photos peuvent être agrandies d'un simple clic
Maison de thé à Koishikawa, le matin après une chute de neige (1830-1832) Hokusai (1760-1849)
Les chasseurs dans la neige
(1565) Pieter Brueghel l'Ancien (1525-1569)
Boulevard Haussmann enneigé Huile sur toile, 65 x 82 cm (1879-1881) Gustave Caillebotte(1848-1894)
La Tempête de neige Huile sur toile, 275 x 293 cm (1786) Francisco de Goya(1746-1828)
Scène d’hiver
1968 Eyvind Earle (1916-2000)
La Remise des chevreuils en hiver Huile sur toile 54 x 72,5 cm (1866) Gustave Courbet (1819-1877)
L'Hiver
(1890) Musée d'Orsay Auguste Rodin (1840-1917)
L'Hiver
(1685/1700) - Le Louvre
Marbre attribué à Pierre Legros (1629-1714)
Casse-Noisette - Valse des flocons de neige
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Salvatore Adamo Tombe la neige (1963)
Voyou L’Hiver (2023)
Jacques Brel
Il neige sur Liège (1963)
Dyonisos Neige (2006)
Julien Doré
On attendra l'hiver (2013)
Camille et Julie Bertholet
L'hiver (Les quatre saisons - Vivaldi)
Henri Salvador et Linda Lemay Jardin d'hiver
Voir ou revoir...
Pour vous réchauffer un peu, vous laisser imaginer que ce n’était pas forcement « mieux avant », je vous propose de lire quelques extraits du Journal d’un bourgeois de Paris 1405-1449
…il geloit si fort que tout Paris estoit prins de glace et de gelée, et ne povoit-on mouldre à nul moulin à eaue nulle part que à ceulx au vent, pour les grans eaues….
(Il gelait si fort que tout Paris était pris de glace et de gelée, et ne pouvait-on moudre à nul moulin à eau nulle part qu’à ceux au vent, pour les grandes eaux...)
Cette paralysie de l’activité économique est encore perceptible en 1432 :
Et comme en hiver, même à notre époque, les soirées sont lonnnngues, à vous de prendre le temps de parcourir ce texte en vieux Francoys et de le moderniser. Bon, pas si difficile que cela !
Et le XIIIe jour de janvier, après l'allée du roy proprement, gela si asprement XVII jours ensuivans que [Saine], qui estoit tres grande, comme jusques dedans la Mortelerie, fut toute prinse de la gelée jusques à Corbeil, et si print en une maniere de admiracion, car le lundy dont elle print, le mardy tout le jour il pleut et toute nuyt, et cessa ung pou devant le jour et faisoit chault, et au point du jour celuy mardy, aussitost que la pluie fut cessée, celle tres mauvaise [et forte] gellée commença qui dura, comme davant est dit, XVII jours. Et, après celle gelée que la riviere estoit ainsi prinse, le jour Sainct Paul il commença à degeler tant doulcement et de nuit et de jour, que la riviere fut toute degelée par pieces, sans faire quelque mal à pons ne à moulins, avant qu'il fust VI jours après. Et si disoient les mariniers qu'elle avoit plus de deux piez de espais, et bien y apparoit, car on alloit par dessus, on y charpantoit piex pour mettre au-devant des moulins pour rompre la glace au degel, on y levoit engins pour frapper les piex, mais oncques ne s'en desmantoit. Et pour vray, par la grace de Nostre Seigneur, elle fut ainsi doulcement desgellée, comme dit est, mais moult grant dommaige fist, car il avoit grant foison vins, blez, lars, œufs, fromaiges qui estoient arivez à Mante pour venir à Paris, mais tout ou bien pres fut perdu pour les marchans, car moult avoit pleu devant, qui tout empira pour la longueur du temps, et si leur coustoit tant en garde que autres frais qu'ilz perdirent presque tout.
Pour approcher un tout autre symbole de l’hiver, paraît-il empreint de sagesse de l’âge mûr, laissons la dernière citation à Clément Marot, poète ancré dans le Moyen-Âge, mais annonçant la Renaissance.
Et maintenant, rendez-vous le 1er avril pour...
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Commentaires
1
bernadette
Le lundi, 22 janvier 2024
Quelle merveilleuse idée ! Je découvre. Je me suis pour l'instant arrêtée à la magie de Bambi.
Je vais poursuivre la lecture à petits pas... enneigés.
Merci beaucoup.