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Par Jean-Luc QUÉMARD

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L’histoire des boulangers et du pain avant et pendant la révolution
(Partie I)

Le Pain, toute une histoire ! Parmi les multiples significations qui lui sont attribuées on peut citer le pain sacré, le pain laïc, le pain commun, le pain quotidien, le pain tel une grande allégorie de l'humanité, puis sous la révolution, le pain de l’égalité.

Avant la révolution

La première réglementation remonte à l’an 1260 au registre des métiers qui stipule dans son premier article : Nuz (nul) ne peut estre (être) talemelier[1] dedans la banlieue de Paris, se il n’achate pas (s’il n’achète) le mestier du Roy.
En 1366 par ordonnance du 12 mars, Charles V décide que « les boulangers du dedans et ceux du dehors de Paris apporteront leurs pains à la halle les jours de marché ». Que le pain soit fait de la même farine et soit du même prix, qu’ils doivent en faire deux sortes : l'un d’un poids valant 4 deniers et l’autre valant 2 deniers.
En juillet et en décembre 1372, ce même roi décide que le prix du pain est fixé à Paris selon le prix du blé. Que selon son poids, le prix du pain blanc ou pain de Chailli ou Chailly[2] doit être de 2 deniers tout comme celui du pain bourgeois d’un poids de 25 onces une fois cuit. Que le pain de brode de qualité inférieure soit du prix d’un denier et pèse 36 onces une fois cuit.
Sous Charles VI le pain est réglementé comme suit : le pain blanc 3 deniers, le pain bis 2 deniers et le pain mêlé d’orge 2 deniers les 13 onces.
Sous Louis XI est institué en 1467 un signe distinctif pour le métier : une bannière (voir figure ci-dessous), et en 1569, le compagnonnage institue une tenue avec défense de l’arborer dans la rue : chemise, caleçon, sans haut de chausse, bonnet (voir figure ci-dessous).

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Les bannières sous Louis XI

La tenue du boulanger au XVe et XVIe siècle

 

Au XVIIe siècle, le métier se perfectionne dans la fabrication, la farine est vendue sans le son aux boulangers. C'est à cette époque qu'est créé le pain de la reine fabriqué avec de la levure de bière, suivi du pain pétri au beurre, au lait… Ces innovations ne feront guère d’émules.
Puis au XVIIIe siècle, la paysannerie subit à plusieurs reprises les réductions drastiques de récoltes de céréales dues au mauvais temps. Ce qui suscite vers la fin de ce siècle la crise politique, l’éventualité de la disette et le désordre social.
Afin de solutionner cet état de misère qui mine le peuple, la Couronne tente à plusieurs reprises de déréglementer le commerce intérieur des céréales et d'adopter une sorte de libre-échange sous la direction de leurs avocats. Cette initiative échoue et rien ne change… Il s’avère que l’inefficacité de ces mesures demeure. Les pénuries alimentaires et les prix excessifs finissent par déclencher un soulèvement populaire dans les villes et villages du Bassin parisien fin avril et début mai 1775. Plus de 300 émeutes et de nombreux pillages de céréales sont signalés en un peu plus de trois semaines. La guerre de la farine est le nom donné à la vague d'indignation publique. Les émeutiers attaquent d'abord Versailles avant de gagner Paris et la campagne.

Les causes de la révolution

Les origines de la Révolution française sont multiples, d'ordre social, économique et politique. Les événements de 1789 sont de fait, issus de plusieurs facteurs conjoncturels et structurels, liés à la période et ancrés profondément dans la société. La réflexion prêtée à Marie-Antoinette apprenant que ses sujets n’ont pas de pain : « Qu'ils mangent du gâteau ! » est entièrement apocryphe, mais elle démontre à quel point le pain est devenu un point de discorde dans l'histoire de France. Une réflexion s’impose : était-ce une insidieuse initiative du Tiers État que de faire circuler un tel bruit au sein du peuple ?

Pendant la révolution 

Nous pouvons ainsi affirmer qu’une des causes économiques principales est due à la famine qui s’annonce, les greniers étant pour la plupart vides de céréales. Le temps peu clément engendre de mauvaises récoltes surtout en céréales, nécessaires à la fabrication de l’aliment principal de cette époque : le pain. L’augmentation du prix de cet or alimentaire va devenir le vecteur de la colère du peuple. Il n’en peut plus de supporter les prix exorbitants de cet aliment tant convoité et nécessaire, surtout pour les classes laborieuses. C’est ce qui suscite la rébellion qui génère la révolution.

Afin d’assainir ces situations où les boulangers peuvent selon leur bon plaisir, procéder à des augmentations non contrôlées, les communes lors des délibérations du corps municipal établissent régulièrement les taxes afférentes au pain. En exemple, cette délibération prise le samedi dix novembre 1790 où le maire, officier municipal de la ville de Verdun d’après les renseignements fournis sur le prix d’achat des grains stipule « avons ouï et requérant le procureur de la commune taxé par provision » :

     - La livre de pain blanc à deux sous : 2 sous soit à ce jour, 1,61€

     - La livre de pain bis blanc à un sou et neuf deniers : 1s 9d soit à ce jour, 1,41
     - 
La livre de pain bis à un sou et 3 deniers : 1s 3d soit à ce jour, 1,01€

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« Enjoignons aux maîtres boulangers de se conformer à la prescrite taxe qui aura lieu lundi prochain jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné ainsi qu’aux différents règlements recouvrant l’exercice de leur profession. En conséquence, de tenir leur boutique et de fournir dans tout ce temps trois espèces de pain bien conditionnés, travaillés selon l’art, bien
essencé, suffisamment cuit et sans mauvais goût »

Et d’ajouter :

« de couper le pain livre par livre et même par demi-livre, au désir des acheteurs, sans pouvoir le cacher dans l’intérieur de leur maison, le tout sous peine de confiscation, d’amende et même d’interdiction suivant l’exigence des faits ».

L’arrêté stipule également que la municipalité ordonne des poursuites à l’encontre des boulangers fraudeurs « ordonnons que la présente proclamation qui sera exécutée par provision nonobstant et sans préjudice à l’appel ou l’opposition sera imprimée et affichée au lieu le plus apparent de leur boutique et publiée partout où besoin sera ». Cette disposition est suivie d’effet car le maire enjoint également au commissaire de veiller à l’exécution de ladite proclamation de police, de s’assurer que les mesures prises soient appliquées et respectées à la lettre « Enjoignons au commissaire de veiller à l’exécution et de cette proclamation, de procéder à des perquisitions, d’adresser des rapports et de constater par procès-verbal toutes contraventions qui seraient faites à ladite proclamation ». Cette délibération est signée par le maire de l’époque, en l’occurrence, Monsieur Christophe au bureau de police à l’hôtel de ville avec les officiers municipaux, le secrétaire et le greffier. À cette époque, il y avait à Verdun, trois catégories de boulangers qui se différenciaient par la qualité de fabrication du pain et du nombre de ventes. La distribution des farines s’effectuait en tenant compte des catégories, la première bénéficiait de la qualité et de la quantité la plus importante.

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 Vous pouvez agrandir ces photos d'un simple clic 
 

Une pièce relatant que les taxes sont provisoires date du 16 prairial An V. Pièce mentionnée « secret ». Cette pièce indique bien que le canton de Verdun est sous l’emprise de l’administration centrale du département et qu’à ce titre, elle en reçoit les consignes. Nous pouvons remarquer que Bar-le-Duc s’appelle à l’époque Bar-sur-Ornin et non sur-Ornain. (Voir pièce ci-dessous)

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Seconde et dernière partie dans "Le coin de
l'historien" du Porte-PLume de novembre


[1] Talemelier, talmelier ou tamelier: nom donné aux premiers boulangers sous le Roi Saint-Louis. Première confrérie rassemblant les gens de ce métier, ce nom est issu du mot tamis et du verbe tamiser (tamiser la farine)..Boulanger vient du mot boule, façon de cuire à partir du moyen-âge le pain en forme de boule compacte. Le mot boulanger deviendra plus usité par la suite…

[2] Pain le plus blanc originaire de la ville connue sous le nom de Chilly-Mazarin, au moyen âge qui a disparu au XVIIIème siècle, le pain coquillé et le pain bis. Il y eut également le pain blanc de Gonesse.

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