L'ombre du sapeur
Il creuse, il creuse, il creuse
Il ne sent plus rien, il creuse,
Il creuse sa tombe.
L’ennemi est si près,
Il l’entend, il l’entend, il l’entend.
L’ennemi creuse aussi.
Lequel des deux mourra ?
Il ne réfléchit plus,
Il creuse.
Il creuse sa tombe.
La roche est si dure,
La boue est si tenace.
Il ne tient plus debout.
Il a faim, il a froid, il a peur.
Il devine la mort
Au bout du long tunnel.
Son torse, nu, luit dans la lumière.
La sueur le submerge.
Son ombre projetée
Fantôme de la nuit,
Vacille entre pénombre et lumière.
Dans ses rêves éveillés,
Il creuse, il creuse, il creuse.
Le bruit noir l’étouffe.
Il descend, il descend, il descend.
10m, 20m, 30m, 100m.
La chaleur, l’air vicié,
Le prend à la gorge et l’étouffe.
Ses forces l’abandonnent.
Et puis, c’est l’explosion.
L’Allemand est plus rapide.
Le temps d’une seconde,
Il repense à sa femme.
C’est le néant, la mort.
Pourquoi, pourquoi, pourquoi,
Cette tuerie mortelle ?
Il ne sait pas,
Cent ans plus tard
Sa famille, son arme, le Génie
L’honorera encore.
Ainsi, il n’est pas mort.
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