Oin
Oin, tel est le titre de ce propos. Je ne m’en étonne point dans la mesure où, depuis fort longtemps, le désir de titiller l’oin m’habitait.
Avant d’aller plus loin, il est important de dire qu’il ne faut pas confondre oin et ouin. En effet, ces deux phonèmes aux graphèmes différents n’ont pas exactement la même prononciation, tant s’en faut. Et si le premier, le plus courant du reste, se prononce [wɛ̃], selon l’API, l’Alphabet Phonétique International, l’autre se prononce [uwɛ̃]. Tout est dans la nuance. Il faut bien prendre soin d’écrire marsouin, pingouin, bédouin, babouin sans oublier le [u] qui se prononce ou. Dites bédoin au lieu de bédouin, un peu pour voir (enfin, pour entendre !) et sentez toute la différence. De même, si vous écrivez jouie, déjà, personne ne comprend qu’il s’agit du mot joie et tout le monde pense à autre chose… Ceci est un mauvais exemple; donc il ne faudra pas en tenir compte. Prenons alors coin ou coing, si vous préférez. Quand on dit [kuwɛ̃] (couin), sentez-vous comme le mot s’allonge ? Alors que coin [kwɛ̃] est très court !
Mais revenons à oin [wɛ̃] . Oindre m’a toujours interpellé, car il fait partie de ces verbes forts peu usités dont bon nombre d’entre nous (à commencer par moi) ne connaît sans doute pas les modes et temps de son emploi. Justement, si vous prenez le mot emploi et que vous y ajoutez un [u], sentez comme cela va devenir lourd en raison de la longueur du phonème. Et imaginez un seul instant que vous êtes au chômage et qu’il vous faut, pour obtenir des indemnités, vous présenter régulièrement à Pôle Emploi. Il va devenir encore plus pénible de pénétrer dans votre agence, car vous allez ployer sous le poids de Pôle Emploi, pour payer votre loyer. Pouah !
Donc, j’aime oindre. D’ordinaire, j’oins en août. Où ? Partout où il faut s’oindre où l’on peut oindre si on vous y enjoint. Mais quand j’oignais en juin, j’enviais le personnel s’oignant.
Quand vous oigniez, savez-vous que vous soignez ? Donc, oignons, oignons-nous le bulbe. Il faut s’oindre il faut aussi l’âme oindre. Mais ce n’est pas pour autant que c’est la moindre des choses ! C’est comme cette femme qui disait à son très, très vieux mari parcheminé : « Je t’aime oint qu’hier, mais bien plus que demain ». C’est peut-être le contraire ou tout autre chose, mais au point où nous en sommes...
Vous l’aurez remarqué : un canard n’est bien qu’oint, car ainsi, il fait coin, et plutôt deux fois qu’une ! Un Malouin s’oint aussi, surtout si son petit s’oint.
Ce n’est pas parce qu’il est un grand oiseau de métal qu’il faut donner à l’avion des grains d’avoine ! Et si vous ne connaissez pas Ouin-Ouin, sachez qu’Ouin-Ouin s’oint également.
La confusoin dans l’écriture de certains phonèmes peut gravement nuire à la compréhensoin. Certaines personnes vont ainsi inverser (non, non ! pas du Coran !) des lettres en raison de problèmes de dyslexie, dysgraphie ou étourderie. Voyons plutôt :
— Le troufoin était allongé dans le fion.
— Je vais lui mettre mon piong dans la figure !
— De lion, on apercevait sa crinière de loin.
— Ce n’est pas parce qu’il est un grand oiseau de métal qu’il faut donner à l’avion des grains d’avoine !
— Le champoin sponsorié par une grande marque de shampiong, a fait un troimphe sur la ligne d’arrivée.
— Le matin, le soleil point Point
Tout pourrait s’arrêter là. Mais notre belle langue française s’offre le luxe de posséder un troisième phonème proche des deux précédents : [wa] qui s’écrit oi. Ouah ! Pas de loi, direz-vous. On ne peut être sans foi ni loi. Il suffit d’être de bon aloi pour ne point être montré du doigt. Mais voyons plutôt les détéroiratoins qu’occasoinne la confusoin loi/io :
— Un camoin était garé au bord du trottior, où un bouvier bernios faisait ses besions. Une vioture venant de la fiore expositoin, qui n’avait pas la proirité est arrivée à toute vitesse et a percuté la vitrine du cioffeur et celle du boulanger qui a vu ses broiches et ses forêts niores exploser. Dans la siorée, le gel avait transformé la chaussée en patiniore. Des témions, dont des viosins ont assisté à la percutoin qui a semé la stupéfactoin.
Enfin, des recherches assidues m’ont permis de dénombrer un certain nombre de mots monosyllabiques contenant l’un de ces trois phonèmes :
— soit, soie, soin, soi, Sion, scions/pois, poids, poix, point, pion/loi, loin, Loing, Lyon, lion/ fois, foi, foie, Foix, foin.
Allez ! bonsior !
|